Mariage et femme noire

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Lors d'un sondage posté sur le canal telegram zawji, 70% des sœurs noires ont estimé qu'il était plus difficile pour elles de se marier en raison de leur couleur de peau. On va essayer d'aborder certains points qui peuvent être la cause de ce sentiment. Avant d'aller plus loin, étant moi-même issu d'une famille africaine noire, mes propos sont tenus en connaissance de cause et n'ont pas pour but de blesser ou dénigrer la femme noire. L'objectif ici n'est pas de racialiser le contenu zawji mais d'évoquer certains éléments qui peuvent in shaa Allah permettre de faire évoluer certaines choses. Sachant que toutes formes de racisme de quel côté qu'il soit, n'a pas sa place en islam et que l'Homme s'élève par sa piété et non par sa couleur de peau.

L'un des premiers aspects que l'on peut évoquer et qui est souvent oublié ; est que les noirs ne sont pas un peuple mais des peuples aux coutumes et traditions variées. Ainsi on ne saurait regrouper tous les noirs sous une même coupe, comme il serait hasardeux de regrouper les personnes blanches sans faire de distinctions entre leurs histoires, leurs coutumes et leurs traditions. Une fois ce distinguo fait, on comprendra assez aisément qu'entre noirs, il y a des perceptions, des mentalités différentes. Ces différences pourraient engendrer chez certains des appréhensions quant au fait de marier leurs filles à telle personne de tel pays, malgré la proximité géographique et la similarité de la couleur de peau. Ainsi c'est parfois entre nous-mêmes que le bât blesse. Et cela est principalement dû à notre ignorance religieuse et l'ignorance que l'on a de l'histoire de nos pays. En effet, si entre nous (noirs), il y a déjà des difficultés à nous accepter, alors comment s'offusquer que des peuples plus éloignés en terme de coutumes, d'histoire et de couleur de peau soient plus enclin à s'unir avec les femmes de nos pays ? Certains parents issus de l'immigration vont même jusqu'à inciter leurs enfants à se détourner des femmes ou hommes de leur pays d'origine ; passant parfois par le dénigrement de leur propre peuple et l'éloge du "pays d'accueil" et de ses habitants. De facto, l'idée véhiculée est que le mariage avec une personne originaire du pays, par exemple en France se marier avec un(e) français(e) dont les origines ne dépassent pas l'hexagone, est un signe de réussite, de succès.

Notre responsabilité parentale implique le combat de cette fausse idée. Premièrement, en tant que parent, on doit toujours privilégier la piété du prétendant. En effet, c'est la piété qui contribuera au bonheur de nos enfants au sein de leur foyer. Deuxièmement, on doit apprendre à nos enfants à s'accepter tels qu'ils sont. Être né noir, blanc, jaune ou rouge n'est pas un choix de notre part. Chaque peuple a ses avantages et ses inconvénients, ses forces et ses faiblesses. Au final, si on né noir cela a été décrété par Allah alors pourquoi chercher à être un autre, ne pas s'accepter tel qu'on a été créé ? Il ne faut pas générer de la frustration chez nos enfants. Ils sont aussi différents d'un blanc, qu'un blanc l'est d'un noir sans hiérarchisation ou notion de supériorité. De fait, l'éducation des enfants sur ces sujets est très importante, spécialement lorsque l'on vit dans des pays où les personnes noires sont en minorité, car elle aura un énorme impact sur les choix de l'enfant au cours de sa vie. Cette transparence permettra à l'enfant de se construire et de s'accepter tel qu'il est, en espérant que cela lui évitera de tomber dans des stéréotypes beaucoup trop ancrés encore de nos jours.

Néanmoins, la femme noire doit comprendre que pour des hommes noirs nés en France, il peut être naturel que leurs désirs penchent plus vers des femmes typées blanches (femmes arabes incluses) car ils ont majoritairement été exposé à ce type de femmes depuis leur enfance. Selon les chiffres de l'INSEE, en 2022, 48,2% des immigrés vivant en France sont nés en Afrique et 32,3% sont nés en Europe. Les pays de naissance les plus fréquents des immigrés sont l'Algérie (12,5%), le Maroc (11,9%), le Portugal (8,2%), la Tunisie (4,7%), l'Italie (4,0%), l'Espagne (3,5%) et la Turquie (3,3%). Près de la moitié des immigrés sont originaires d'un de ces sept pays (48%). Ces chiffres confirment donc le fait que l'immigration des personnes originaires de l'Afrique subsaharienne reste minoritaire. C'est comme si une communauté noire s'établissait en Asie, la majorité des enfants issus de cette communauté pourra développer des préférences pour la femme asiatique. La préférence physique est une réalité qui n'est pas systématiquement liée à un dénigrement de l'autre ou bien d'une non acceptation de ses origines. Ce point est essentiel car il permet de faire la part des choses et de ne pas porter de jugement actif sur les choix d'une personne. Tout comme la femme noire peut avoir des préférences pour des hommes typés blancs. La réalité c'est que la femme étant sous la tutelle d'un de ses tuteurs, ce choix ne passe pas nécessairement dans certaines communautés. Même si du côté de l'homme, les parents préféreraient une femme de la même origine que leur fils, le fils n'étant pas soumis à la tutelle, il aura plus de facilité à marier une femme d'un autre peuple. C'est un facteur qui explique entre autres, pourquoi les hommes noirs sont moins touchés par la difficulté de se marier que leurs soeurs.

L'acceptation des hommes noirs par des femmes d'autres peuples peut également être motivée par la volonté d'avoir des enfants métisses. Ce choix "esthétique" est plus répandu auprès des femmes que des hommes. Elles estiment que les enfants métisses sont plus beaux que les enfants non métissés. Tout comme certains hommes préféreront avoir des enfants métisses. Chez certains d'entre eux, cela pourra inconsciemment être le fruit du colorisme, qui se propage de plus en plus chez certaines personnes afro-descendantes. Le postulat de base étant que plus c'est clair, plus c'est beau et plus c'est acceptable. Cette discrimination intra-communautaire est l'un des fléaux qui peut expliquer pourquoi certaines personnes afro-descendantes se tournent vers d'autres peuples.

Par ailleurs, le poids des coutumes diffère selon notre communauté d'origine. Ce poids, certains hommes éduqués sur un modèle autre que celui de leurs ancêtres, n'en voudront pas lors de leur recherche de mariage. C'est pourquoi, certains d'entre eux abandonnent tout bonnement l'idée de se marier avec une femme de leur peuple. Certaines coutumes en plus d'être pesantes pour des personnes n'ayant pas été réellement éduquées sur ces dernières, peuvent être très coûteuses pour un homme ayant peu de moyens et désirant se marier afin de préserver sa personne.

Dès lors, il ne faudra pas systématiquement pointer du doigt les hommes noirs mais comprendre le problème dans sa globalité. Le choix des parents à venir s'installer dans des pays étrangers n'est pas sans conséquences sur la situation actuelle de certaines de nos soeurs. Même si les conseils des savants vont dans le sens, d'épouser une personne issue de son peuple afin de faciliter les relations conjugales et familiales ; dans les faits ce n'est pas nécessairement ce que nous observons. Ce conseil, certains le comprennent une fois marié avec une femme d'un autre peuple. D'ailleurs on observe parfois que des hommes noirs mariés avec une femme d'un autre peuple, souhaitent en cas de polygynie "revenir aux sources" en épousant une femme plus proche de leurs origines. Les différences culturelles peuvent également être la cause de conflits conjugaux, si elles ne sont pas dès le départ assimilées et acceptées par les époux.

La communication au sein des familles même avec l'intervention d'un oncle si besoin, peut aider certaines soeurs à avancer dans leur recherche de mariage. Elles devront aussi éduquer leurs frères dans le respect qu'ils doivent avoir de la femme dans son ensemble et ne pas prendre à la légère tout dénigrement envers les femmes et plus particulièrement celles de son peuple. En effet, en dénigrant les femmes de son pays c'est comme s'ils dénigrent indirectement leurs propres mères. Il faut sortir de cette logique de victimisation et tout rattacher au racisme. D'ailleurs, le mot esclave lui-même fait référence à une personne blanche car tiré du mot slave et autrefois les slaves servaient d'esclaves.

Enfin, il est important de rappeler le commentaire de l’imam as-San'ânî رحمه الله dans Subul as-Salam concernant le mariage de Bilâl avec Hâla bint 'Awf, la sœur de 'Abd al-Rahmân ibn 'Awf رضي الله عنهم, sur le fait que c’est la religion qui est prise en compte tandis que les autres considérations viennent en second plan. Ces autres considérations comportent des avantages et des inconvénients, comme la beauté, la noblesse, la richesse, la volonté de rechercher une personne de race ou de culture différente, ou de tout autre singularité recherchée chez le conjoint, alors que la religion n’a que des avantages, tant que l’intention est saine et que le respect des préceptes de la religion est préservé des facteurs de corruption.

Comme nous le rappelle ce grand imam, la religion n'a que des avantages. Il ne faut pas tout mélanger et commencer à s'enfoncer dans une lutte des races. Certaines organisations communautaires sous couvert de l'Islam, qu'ils ne pratiquaient pas réellement et dont le dogme était en opposition avec l'authentique dogme islamique, comme la Nation of Islam ont attiré des gens dans leurs rangs avec ce type d'exagérations raciales.

Ps : je rajouterai des éléments dans cet article in shaa Allah, car par manque de temps je n'ai pas eu l'occasion d'aborder tous les points qui me semblaient pertinents.